Son mari est le dernier à l’avoir vue vivante | Affaire Missenard

Le 26 juillet 1999, à la clinique d’Eich à Luxembourg, une ombre glaciale s’abat sur la vie de Béatrice Missenard, 46 ans. Hospitalisée pour une infection du sang, elle semble pourtant sur la voie de la guérison. Son mari, Charles Missenard, directeur du laboratoire de la clinique, lui rend visite. Quelques instants après son départ de la chambre, un cri, des convulsions, puis le drame : Béatrice entre en état de mort cérébrale et décède à 20h20. Une mort brutale, inexplicable, qui sidère l’équipe médicale.

Le refuser d’autopsie et la suspicion du médecin

Le docteur Wirt, perplexe face à cette disparition fulgurante, demande une autopsie. À sa grande surprise, Charles Missenard s’y oppose farouchement, invoquant des raisons humaines. Mais le médecin, soupçonnant une cause de mort “inconnue et suspecte”, outrepassera son refus, déclenchant ainsi une enquête judiciaire. Ce qui sera découvert quelques jours plus tard fera l’effet d’une bombe : Béatrice Missenard n’est pas morte d’une maladie, ni d’une erreur médicale. Elle a été empoisonnée au cyanure, à une concentration trois fois supérieure à la dose mortelle, administrée par intraveineuse.

L’empoisonnement foudroyant suggère la présence du meurtrier dans la chambre. Les enquêteurs se tournent vers l’entourage de Béatrice. Une amie, Anna Azormendi, avait rendu visite à Béatrice plus tôt dans la journée, mais son témoignage écarte toute suspicion. L’attention se porte alors sur Charles Missenard, le dernier à avoir vu sa femme vivante.

Un mari au-dessus de tout soupçon ?

Charles Missenard, biologiste reconnu, docteur en biologie et directeur d’un laboratoire d’analyse médicale, est un homme qui a gravi les échelons sociaux par son travail acharné. Originaire d’un milieu modeste, il est décrit comme compétent, consciencieux et respecté. Il rencontre Béatrice, une femme de caractère, célibataire et indépendante, en 1997. Huit mois après leur rencontre, ils se marient. Un couple sans histoire, en apparence.

Pourtant, l’enquête de personnalité révèle des zones d’ombre. Charles est un homme intransigeant, arrogant, voire méprisant envers ses collègues et sa propre femme. Le couple serait au bord de la rupture. Une collaboratrice du laboratoire témoigne même que Charles aurait proféré des menaces de mort envers Béatrice, envisageant de la “renvoyer en Espagne, soit sur ses deux pieds, soit dans une petite boîte”.

Des preuves accablantes : Cyanure, bactéries et perfusions

Le tournant de l’enquête survient lorsque le docteur Wirt révèle un détail crucial : le jour du décès de Béatrice, Charles Missenard, bien que non habilité, a préparé et installé la perfusion de sa femme. Les infirmières confirment qu’il était seul dans la chambre pendant ce laps de temps. Or, Béatrice a été empoisonnée au cyanure par intraveineuse. La corrélation est troublante.

Une perquisition au laboratoire de Charles Missenard permet de retrouver du cyanure. Il disposait donc de “l’arme du crime”. Mais ce n’est pas tout. Les policiers apprennent que ce n’est pas la première hospitalisation de Béatrice. Trois mois auparavant, elle avait été prise d’un malaise après avoir bu un jus d’orange préparé par son mari. Des prélèvements sanguins, confiés à Charles pour analyse dans un laboratoire indépendant, ont mystérieusement disparu. L’assistante du laboratoire témoigne également que Charles cultivait une souche de staphylocoque doré très dangereuse, qu’il aurait ramenée chez lui, et que cette bactérie a été retrouvée dans l’organisme de Béatrice lors de sa première hospitalisation. Pour les enquêteurs, Charles Missenard aurait tenté d’empoisonner sa femme une première fois avec les bactéries, puis, après l’échec de cette tentative, aurait utilisé un moyen plus radical : le cyanure.

Affaire Missenard : ce médecin a-t-il empoisonné sa femme au cyanure ?

Un passé troublant : les “accidents” précédents

La liste des “accidents” ne s’arrête pas là. Dix ans plus tôt, en décembre 1993, Alice Bartz, la précédente compagne de Charles Missenard, est hospitalisée dans la même clinique suite à un étrange malaise. Elle décède la veille de sa sortie, alors que Charles Missenard est vu sortant de sa chambre juste avant sa mort. L’infirmier anesthésiste André Heine, qui travaillait déjà à la clinique, avait des doutes sur ce décès.

Et dans les années 80, la toute première épouse de Charles Missenard a également été victime de plusieurs malaises inexpliqués. Elle avait même accusé son mari de vouloir l’empoisonner, portant plainte. Une succession de morts et de malaises autour de Charles Missenard, un schéma troublant qui pousse les enquêteurs à se demander s’il pourrait être un tueur en série.

Un procès sous haute tension et des vices de procédure

Arrêté à son retour des obsèques de Béatrice, Charles Missenard clame son innocence, mais les enquêteurs sont convaincus de sa culpabilité. Le 12 mai 2003, il comparaît devant la chambre criminelle du tribunal de Luxembourg pour assassinat. Dès le début du procès, ses avocats ont le sentiment que la conviction des juges est déjà forgée, dans une ambiance “extrêmement tendue et agressive”.

La défense va alors soulever une série de négligences et d’incohérences flagrantes. Les prélèvements de cyanure, réalisés par l’infirmier André Heine sans contrôle ni scellés, ont été conservés chez lui, dans son réfrigérateur, laissant planer le doute sur leur intégrité. L’absence d’ADN ne permet même pas de confirmer qu’ils proviennent bien de Béatrice. L’expertise toxicologique, base de l’accusation, n’a jamais pu faire l’objet d’une contre-expertise, car le corps de Béatrice a été incinéré 48 heures seulement après son décès, détruisant ainsi des preuves potentielles. De plus, le fait que le cœur de Béatrice ait repris une activité durant la réanimation est jugé incompatible avec un empoisonnement au cyanure. Enfin, un détail troublant : le rapport d’autopsie mentionne le nom d’une autre personne, une “Madame Dias Rodriguez”, soulevant la question de savoir si le bon corps a bien été autopsié.

Malgré toutes ces réserves, le 10 juillet 2003, Charles Missenard est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Il reste digne, mais effondré, clamant son innocence.

Un rebondissement inédit et une libération inattendue

En appel, le 15 mars 2005, le procès prend un tour inattendu. Les avocats de Charles Missenard découvrent qu’il manque des volumes entiers au dossier d’instruction, signifiant que la défense n’a pas eu accès à toutes les pièces. Un vice de procédure manifeste. Maître Colette demande le renvoi du procès et, fait incroyable, la libération conditionnelle de son client. Contre une caution de 75 000 €, Charles Missenard, un condamné à perpétuité, est libéré. Du jamais vu. Le procureur général lui-même remettra le dossier complet à la défense, reconnaissant de “graves erreurs de procédure”.

Pourtant, le 23 janvier 2006, Charles Missenard est une nouvelle fois condamné à la perpétuité. Mais à la surprise générale, il n’est pas incarcéré. Un “cafouillage administratif” lui permet de retourner en France, où il reprend une vie normale, retrouvant même un emploi dans un laboratoire.

La fin d’une cavale et la quête de révision

Sa liberté sera de courte durée. Le 13 août 2007, il est arrêté sur son lieu de travail et purge désormais sa peine en France, à la centrale de Poissy. De sa cellule, Charles Missenard continue de clamer son innocence, se battant pour la révision de son procès. “Jamais je ne baisserai les bras car un homme innocent accusé et condamné à tort ne se résoudra jamais à cet enfer carcéral que je subis”, écrit-il.

L’affaire Missenard demeure un mystère judiciaire, entre les soupçons accablants, les morts inexpliquées et les vices de procédure. L’ombre du biologiste, entouré de drames, continue de planer, laissant la question de sa culpabilité ou de son innocence toujours ouverte, dans l’attente d’une révision qui pourrait, peut-être un jour, éclaircir cette affaire hors norme.

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